Le réveil fut brutal.

Discours du père de Souheil lors de la marche du 8 juillet 2023 "Justice pour Nahel et justice pour tous, nos révoltes sont légitimes"

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Discours du père de Souheil lors de la marche du 8 juillet 2023 "Justice pour Nahel et justice pour tous, nos révoltes sont légitimes"

📢 "Les débats sur l’intégration ne sont qu’un contre feu pour justifier l’intolérance, le racisme, la perpétuation des privilèges. Nous ne voulons plus de ces privilèges, nous voulons une juste répartition de la richesse (...)"

👉 8 juillet 2023, place Cadenat dans le quartier de la Belle de mai
Discours de Issam el Khalfaoui, père de Souheil tué par la police le 04 août 2021.

👉 Une prise de parole parmi d’autres tenue lors de la marche "Justice pour Nahel et justice pour tous, nos révoltes sont légitimes"

Discours intégral :

Bonjour à tous. Je suis Issam El Khalfaoui , le papa de Souheil tué ici même par la police le 04 août 2021. Je ne vais pas vous parler de la mort de Souheil aujourd’hui, si ce n’est pour implorer les témoins du meurtre de mon fils de dire précisément au juge ce qui s’est passé, pour que vérité soit faite. Ne craignez pas la police, présentez aux yeux de toute la France combien l’institution policière est gangrénée 


· En fait aujourd’hui, je vais vous raconter l’histoire d’un petit garçon brillant. Un petit maghrébin né à Saint Denis dans le 93. Il était le premier de l’école au primaire, une école ou il y avait peu de maghrébins, et encore moins de noirs. Les insultes comme « sale arabe » étaient récurrentes. 


· Puis ce garçon maintenant un peu plus grand est entré au collège. Et là encore, il était brillant, le premier de toutes les 6émes. A la fin de l’année, sa professeure d’anglais, appelait ses parents, affolée : la principale avait pris une décision unilatérale, le jeune garçon irait dans la 5eme la plus difficile. Une expérience disait cette principale, on allait mettre le meilleur élève de 6eme avec les moins bons, les plus dissipés pour voir s’il y aurait un effet d’entrainement. Pas un groupe d’élèves, non, un seul, le meilleur, l’arabe. Pur racisme dénonçait la professeure d’anglais 


· Au lycée c’est son prof de Math qui n’hésitait pas à saquer son dossier pour les classes préparatoires. En Math Sup, on lui refusait les écoles parisiennes alors qu’ils étaient dans les mieux classés 


· En École d’ingénieur, c’était la galère à chaque fois qu’il fallait trouver un stage, c’était refus sur refus, et quand par miracle il en obtenait un, le premier jour du stage, il avait droit à une mise au point sur le fait qu’il ne fallait pas voler au sein de l’entreprise.... 


· Pour son service militaire, dès son premier jour il dû faire face à une avalanche de propos raciste du genre tu es un bougnac : croisement entre le bougnoule et le macaque.... Et pour faire taire tous ces racistes, il travailla d’arrachepied dans ce service, son savoir-faire fut reconnu, son abnégation, sa capacité de travail furent même récompensé par un voyage en Autriche avec les officiers les plus gradés. 


· Rebelote durant ces premières années en tant qu’ingénieur, nombre de poste ne lui étaient pas accessible, et les promotions réservées à ceux qui allaient boire des coups le soir. Il décida finalement de s’installer en indépendant 


· Et c’est sans parler des contrôles de police par dizaine, du pistolet sur la tempe pour avoir refuser un abus de propriété à des policiers en civils, des contrôles d’identité ou il a été menotté et humilié devant ses camarades de classes, des heures dans le panier à salade pour avoir oublié ses papiers à la maison et j’en passe... 


· Toute sa vie durant, il a dû faire plus que les autres. Être plus brillant, être plus gentil, plus serviable, plus aimable, plus généreux.... 


· A force de faire plus, il avait l’impression d’être intégré, que sa couleur de peau ne comptait plus. Il habitait dans des quartiers bobo à Paris puis à Marseille, gagnait bien sa vie en tant qu’indépendant.

· Son inconscient avait construit une protection mentale, une espèce de barrière. Il avait oublié les difficultés de sa vie lorsqu’il habitait la cité rose, la violence du quartier dû à la pauvreté, toutes les inégalités auxquelles il avait pu faire face. 


· Jusqu’au jour funeste où son fils Souheil prenait une balle en plein cœur ici à Marseille, exécuté par un policier stagiaire. Le réveil fut brutal, le racisme m’a rattrapé de plein fouet. Je dis rattrapé, mais en fait il ne m’a jamais vraiment quitté, j’avais juste appris à vivre avec au lieu de le combattre. 


· 5 ans de sessions avec une psychologue m’ont fait me rendre compte combien le racisme a dirigé ma vie, combien je me sens prisonnier d’en faire toujours plus que les autres.... Si je vous ai raconté tout cela, c’est parce que malgré tout ce que j’ai vécu, ma première réaction apres les émeutes a été de dire pourquoi ils font ça pourquoi ils gâchent tout ? Oui même moi, qui ai perdu mon fils adoré à cause du racisme systémique, à cause d’une police violente et raciste, j’en voulais en privé à ces jeunes. C’est dire combien le système nous manipule. Mais rapidement j’ai compris qu’en fait ils n’ont rien gâché du tout. Ils se révoltent parce qu’ils n’en peuvent plus des inégalités, ils n’en peuvent plus de ne pas avoir d’avenir. Ils n’ont plus rien à perdre malheureusement, à part une « vie de merde » comme je lis sur nos murs. Pourquoi brulent t’ils les écoles, les mairies : et bien parce que c’est la seule représentation de l’état qu’ils connaissent. A quand une préfecture ou une antenne d’un ministère dans les quartiers nord ou les banlieues ? Ces jeunes ont besoin de rêver, ont besoin de voyager, ont besoin de vivre, pas de survivre. Il est de notre responsabilité, nous les adultes, nous les anciens de les protéger, de nous battre pour que leur avenir soit meilleur que le nôtre. Et Je suis profondément convaincu que seul la grève des racisés pourra faire évoluer les choses...Alors à quand notre syndicat ?

· Le gouvernement, raciste et fasciste, autorise une cagnotte de la honte, une cagnotte qui incite au meurtre, et de ce fait est contraire à la loi malgré la déclaration du ministre de la Justice. Combien de policiers seront tentés d’abattre un noir ou un arabe en espérant toucher le pactole ? Parallèlement à cela, Le président de la République, fait fi de la séparation des pouvoirs, et fait condamner nos jeunes à des peines indécentes au regard de leurs actes. 


· Nahel, Souheil conduisaient sans permis, mais plus de 500000 français conduisent sans permis. Jade Lagardere a été condamnée car elle avait acheté le sien ; les enfants des nantis Marseillais conduisent aussi sans permis, mais papa et maman leur achètent des voitures sans permis à 10000 euros. Pourtant seuls nos enfants nous les racisés sont exécutés pour ce motif. 


· M. Macron, n’a rien proposé après la mort de Nahel si ce n’est le statu quo, il a balayé du revers d’une main le meurtre, en disant que la justice effectue son travail tout en occultant les mensonges des policiers, les dangers de la 435-1, la nécessité de la caméra piétonne et de l’indépendance de l’IGPN. Et de l’autre main il balai la révolte de nos jeunes en attribuant les émeutes de façon purement hypocrite au réseaux sociaux et au jeux vidéo pour justifier une répression policière et judiciaire de plus en plus insupportable. 


· Darmanin et Macron son dépendants des syndicats de police qui leur permettent de diriger le peuple par la force. Les émeutes ne sont que l’écho de l’attitude des policiers qui blessent qui mutilent qui tuent depuis l’arrivée de ce président des riches. L’Etat a engendré un monstre, le syndicat raciste Alliance, qu’il ne maitrise plus ! 


· Alors aujourd’hui, je ne veux plus me taire, je veux crier toute ma douleur, toute ma rage. Je suis un modèle d’intégration si on prend les critères de ces haineux. Et pourtant j’en ai pris plein la gueule si j’ose dire tout au long de ma vie. Les débats sur l’intégration ne sont qu’un contre feu pour justifier l’intolérance, le racisme, la perpétuation des privilèges.


· Nous ne voulons plus de ces privilèges, nous voulons une juste répartition de la richesse, nous souhaitons l’égalité des chances. Nous voulons que nos banlieues, que nos quartiers défavorisés jouissent des mêmes avantages que les autres quartiers, que nos jeunes bénéficient de la même éducation. Nous voulons que nos enfants s’épanouissent dans leur vie, leur loisir, leur travail
Alors aujourd’hui on dit STOP tous ensemble

· STOP AUX INEGALITES

· STOP AUX DISCRIMINATIONS
· STOP AU RACISME

· STOP AUX VIOLENCES POLICIERES
· STOP AUX VIOLENCES JUDICIAIRES
· STOP AUX MENSONGES D’ETAT.


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