Bolivie : mise au point sur le conflit du TIPNIS

C’est déjà assez lamentable que nous ayons un nouveau conflit dans le champ populaire (qui autant dû au gouvernement que nous avons choisi qu’à la CIDOB [2], qui a eu un rôle important dans tout ce processus) pour nous demandions son avis à une droite qui ne s’est jamais préoccupée ni de la Terre-Mère ni de la dignité des peuples indigènes, et qui pourtant apparaît maintenant toute empressée et préoccupée par ces problèmes.

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C’est déjà assez lamentable que nous ayons un nouveau conflit dans le champ populaire (qui autant dû au gouvernement que nous avons choisi qu’à la CIDOB [3], qui a eu un rôle important dans tout ce processus) pour nous demandions son avis à une droite qui ne s’est jamais préoccupée ni de la Terre-Mère ni de la dignité des peuples indigènes, et qui pourtant apparaît maintenant toute empressée et préoccupée par ces problèmes.

À l’heure où l’on discute si le lien du Beni avec Cochabamba doit ou non passer par le Territoire Indigène du Parc National Isiboro-Sécure, ce qui doit intéresser ce sont les arguments qui motivent le gouvernement (et une grande partie des organisations sociales) pour insister sur ce tracé routier, et les arguments qu’à la CIDOB (et une autre grande partie des organisations sociales et des groupes environnementalistes) pour proposer une modification du tracé. Bien sûr les forces de l’opposition ont aussi le droit de penser, et même on ne peut pas leur refuser le droit d’essayer de manoeuvrer pour tirer la couverture à elle. Mais pas que ses opinions et ses manoeuvres soient utilisées pour nous disqualifier les uns les autres.

Dans un cours d’eau trouble — et il est troublé par notre faute — c’est inévitable que des pêcheurs cherchent leur gain, que le gouvernement de Santa Cruz offre son appui aux marcheurs indigènes (avec l’unique objectif de déstabiliser le gouvernement, puisque c’est son intérêt), qu’une députée de Convergencia Nacional offre inutilement des souliers aux marcheurs (avec le même objectif), ou qu’un fonctionnaire de l’Ambassade (l’habituelle) cherche désespérément le contact avec les dirigeants indigènes pour leur offrir un appui qu’elle pense gênant pour le gouvernement. On ne peut éviter tout cela. Ce que par contre il fallait éviter c’était de manipuler toutes ces manoeuvres, qui viennent du camp adverse, pour tenter de résoudre un conflit qui se déroule dans notre camp.

De la même manière qu’il serait absurde de disqualifier la position gouvernementale parce qu’elle a l’appui des éleveurs benianos (ou cela signifie-t-il que la FEGABENI est moins à droite que le Comité Civique cruceño [4] ?). Ce dont nous devons discuter ce n’est pas que tel ou tel dirigeant a reçues un appel téléphonique [5], ou quelles annonce d’appui vient du camp adverse pour l’une ou l’autre position ; ce dont nous devons discuter c’est si les raisons géopolitiques de relier Cochabamba avec le Beni sont plus importantes que les droits de la Terre-Mère (concept que la droite n’a jamais défendu et ne peut connaître) ; ce dont nous devons discuter c’est notre concept de développement (celui qu’utilise la droite comme nous le savons et qui définitivement n’est pas utile) et sa pertinence par rapport au nouveau paradigme de Bien Vivir.

Si nous ne nous concentrons pas sur le débat ouvert et ne sommes pas impartial sur cette thématique, si au contraire nous nous consacrons à la disqualification de celui qui pense différemment, si nous sommes obsédés par l’idée que nos peuples indigènes des Basses Terres ne sont pas capables d’avoir leurs propres idées et de prendre leurs propres décisions, mais qu’il y a un entité obscure qui les dirige (que ce soit l’adversaire de droite, ces fantômes nommés ONGs, ou l’habituel impérialisme) tout ce que nous obtiendrons ce sera de nous user entre nous, comme c’est déjà arrivé à Caranavi [6], et à Potosí [7], comme ça l’est encore cette fois avec la CIDOB, et dernièrement avec la COB [8].

Et encore un mot. Toute cette série d’affirmations que nous entendons de la part de nos dirigeants originaires de la Haute Terre qui insinuent que les pauvres indigènes de la Basse Terre ne comprennent pas ce qu’il leur convient, qu’ils se font manipuler par les forces obscures mentionnées plus haut, et que lorsqu’ils arriveront dans les hautes terres andines [9] nous leurs ferons comprendre que tout ce que nous faisons nous le faisons pour leur bien... Cela ne leur rappelle-t-il pas le discours de Hernán Cortés, de Francisco Pizarro et des missionnaires ? Ne faudra-t-il pas multiplier par cent le budget de notre Viceministère de la Décolonisation, de manière a ce qu’il puisse commencer par notre propre maison ?


Source : Revista Pueblo
Traduction : Primitivi


[1CIDOB : Confederación de Pueblos Indígenas de Bolivia, Confédération des Peuples Indigènes de Bolivie

[2CIDOB : Confederación de Pueblos Indígenas de Bolivia, Confédération des Peuples Indigènes de Bolivie

[3CIDOB : Confederación de Pueblos Indígenas de Bolivia, Confédération des Peuples Indigènes de Bolivie

[4Pour plus d’info sur le Comité Civique voir Article XI à ce propos

[5Le gouvernement de Morales accuse l’ambassade US d’être en relation téléphonique constante avec les dirigeants indigènes, voir "Evo revela injerencia de EEUU en marcha de la Cidob".

[6Au printemps 2010 le gouvernement annonce la construction d’une usine de traitement des agrumes dans la région du Haut Beni, alors qu’il l’avait promis aux habitants de la région de Caranavi. Le conflit cessa lorsque Morales dédida de construire deux usines.

[7Au cours de l’été 2010 la découverte d’un gisement calcaire et la modification de frontières entre deux départements a entrainé un conflit qui dura une vingtaine de jours, voir Amerikenlutte

[8COB : Central Obrera de Bolivia, Centrale Ouvrière de Bolivie

[9La 8° marche indigène se dirige vers La Paz

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